L 'EPIPHYSIOLYSE DE LA HANCHE
I- Introduction:
1- Définition:
C'est le glissement postero-inférieur et médial de la tète fémorale( épiphyse) par rapport au col fémoral (métaphyse) à travers la plaque de croissance
Il s'agit d'une pathologie fréquente de la hanche chez l'adolescent entre 9 et 16 ans survenant au début de la puberté lors de l’accélération de la vitesse de croissance
Cette période à haut risque d'EFS dure environ 18 mois
- Son traitement est chirurgical pour stopper le glissement
2- Mécanisme:
- C'est le déplacement du col fémoral en haut et en avant poussant ainsi la tete fémorale qui reste toujours au niveau du cotyle fixée par le ligament rond la poussant en bas et en arrière
- Le glissement s'effectue au niveau du cartilage de conjugaison plus exactement au niveau des couches cellulaires hypertrophiques qui a une moindre résistance
- L’existence d'un tubercule épiphysaire pontant la physe en postéro-supérieur assure la stabilité de la jonction la tete - col
- Ainsi le déplacement serais du à un glissement en rotation autour du tubercule dans les formes stables, et une translation par rupture brutale dans les formes instables
- Le plus souvent l'épiphysiolyse fémorale supérieure résulte d'un déséquilibre entre les forces de cisaillement s'exerçant sur l'épiphyse fémorale proximale et la résistance du cartilage de conjugaison, ces causes qui augmentent les forces sont multiples: le poids, un angle de rétroversion fémorale augmenté ainsi que la profondeur acétabulaire, augmentation de la pente postérieure de la physe supérieur à 12° ( la normale: 5°) et qui est un critère de fixation bilatérale d'emblée
3- Épidémiologie:
- L'incidence varie en fonction des pays et des éthenie allant de 0,2 pour 100000 habitants au japon à 10,8 pour 100000 aux états unis
- L'age moyen de survenue est de 12 ans chez la fille et de 13,5 chez le garçon
- Prédisposition masculine dans 60% des cas
- Sexe ratio 3/1 à 2/1 pour le sexe masculin
- Les variations épidémiologiques sont liées à l'augmentation de l'IMC moyen par rapport à l'age
- Les adolescents masculins sont une population à haut risque d'épiphysiolyse fémorale supérieure
- Elle peut toucher aussi les adolescents de poids normal, maigres et sportifs.
- - Dans 20 à 25 % des cas elles est bilatérale
4- Étiologies:
- Il s'agit d'une pathologie multifactorielle dont les facteurs mécaniques ne suffisent pas pour expliquer le glissement
- Il s'agit d'un accident de fin de croissance signant le vieillissement prématuré du cartilage de conjugaison suite à un trouble qui peut être hormonal: hypothyroïdie, hyperparathyroïdie, des troubles métaboliques, des troubles toxiques, certaines maladies osseuses: ostéodystrophie rénale, ostéoporose constitutionnelle
- L’obésité est fortement incriminée dans la survenue de l'EFS par le biais de facteurs hormonaux aussi impliquant la léptine
- Il existe des épiphysiolyses post traumatiques dans 25% des cas , le traumatisme est minime en général et n'est pas proportionnel à la lésion
- Autres facteurs sont incriminés comme une activité sportive importante
- L’existence d'une phase douloureuse ou bien d'une impotence passagère précédant le traumatisme
- L'épiphysiolyse fémorale supérieur idiopathique
II- Présentation clinique:
- Classiquement, il s'agit d'un adolescent de sexe masculin, obèse
- Présentant une boiterie à la marche en rotation externe avec des gonalgies
- Douleurs au niveau de l'aine et de la cuisse
- Pas de notion de fièvre ni altération de l'état général
- Dans certains cas l'appui est impossible
- Les symptômes sont exacerbés par un traumatisme minime
- L’examen clinique retrouve:- une hanche en rotation externe
- léger raccourcissement du membre inférieur
-amyotrophie du quadriceps témoignant de la chronicité
- la flexion de la hanche entraîne la rotation externe automatique de la hanche ( le signe de Drehmann)
-l'abduction, la flexion rotation interne diminues
- La forme bilatérale est le plus souvent asymptomatique
-Les différentes classifications de l'EFS:
1- classification de LODER:
elle est essentiellement clinique dépendant de la stabilité de la physe et directement liée au risque d'ostéonécrose potentielle de la tete fémorale
EFS stable: l'adolescent pose son pied sur le sol
marche avec ou sans béquilles
EFS instable: adolescent ne pouvant pas s’appuyer sur son membre inférieur
2- La classification échographique: permet d'évaluer le risque d'ostéonécrose
EFS stable: pas d'épanchement intra articulaire
existence de signes de remodelage métaphysaire ( risque d'ostéonécrose proche de 0%)
EFS instable: épanchement intra articulaire
avec ou sans remodelage métaphysaire ( arrachement du périoste et de vaisseaux postérieurs qui irriguent la tete fémorale: risque potentiel d'ostéonécrose)
3- La classification traditionnelle: elle est abandonnée, elle classe l'EFS en quatre stades
Stade I: stade de pré-glissement ou décollement sans glissement
Stade II: décollement aigu brutal sans prodrome
Stade III: acutisation sur un glissement chronique
Stade IV: EFS chronique
4- La classification en fonction de la du durée des symptômes:
EFS aiguë:
- La symptomatologie dure depuis plus de trois semaines indépendamment de l'impotence fonctionnelle
- Elle survient dans 15% des cas
- Associée à des coxalgies et des gonalgies
- Douleurs ressemblant à celles de la fracture
- Absence de signes de remodelage à la radiographie
EFS chronique:
- Douleur avec ou sans boiterie depuis plus de trois semaines
- Douleurs vagues
- 85 % des cas
-Signes de remodelage visibles sur la radiographie
EFS aiguë sur chronique:
- Le patient présente des douleurs vagues depuis plus de trois semaines et qui deviennent subitement importantes
5- La classification radiographique:
- Elle dépend du déplacement
- Mesure des angles diaphyse-épiphyse et épiphyse - col
- Le déplacement est considéré comme
Bénin: bascule inférieure à 30°
Modéré: bascule entre 30°- 60°
Sévère: bascule supérieure à 60°
III- Explorations radiologiques:
- La radiographie standard:
- Examen clé pour le diagnostic et l'évaluation du glissement
- Et pour le choix thérapeutique
- Deux incidences sont indispensables:
La radiographie du bassin de face en décubitus dorsal pieds en rotation interne 15 à 20°si cela est possible
La radiographie de profil vrai en décubitus dorsal, cuisse fléchie sur le tronc, le talon du coté à radiographié touche le genou opposé, la face externe de la cuisse surélevée à 45° de la table
il est important de réaliser un profil du coté opposé pour effectuer une lecture comparative
L'incidence profil en grenouille de Lauenstein qui réalise le profil simultané des deux cotés, elle reste de réalisation difficile
- Résultats:
Sur le bassin de face: on recherche les quatre signes traduisant le décollement
1- Élargissement de la physe qui prend un aspect feuilleté ou dédoublé
2- Diminution de la hauteur relative de la tete fémorale par rapport au coté opposé
3 - La visualisation progressive du bord postérieur de la tete fémorale en arrière du col ( metaphyseal blanch sign)
4- La réduction du débord de la tete par rapport à la ligne de Klein, qui est un signe plus tardif, nécessitant une étude comparative lorsque la ligne de klein coupe l'épiphyse ça n'élimine pas le diagnostic ( la ligne de Klein est la tangente au bord supérieur du col fémoral)
- La déminéralisation par défaut d'appui est plus visible sur le scanner et n'a aucune spécificité
- La mesure du degré de glissement
L'incidence de profil : le glissement est plus évident
- On mesure l'angle de Southwick : tracer l'axe du col ainsi que l'axe de l'épiphyse qui est perpendiculaire à la tangente à l'épiphyse
- On recherche l'élargissement du cartilage de croissance
- Déterminer l'age osseux: élément important pour la prise en charge chirurgicale
- Réaliser un cliché controlatéral: risque de 4% lorsque le cartilage en Y est fermé
- L'échographie :
- Elle a une place importante dans le diagnostic
- Elle fait partie du bilan de la boiterie
- Elle est plus performante que la radiographie pour les glissements faibles et l'analyse des signes de remodelage du col dans les EFS évoluées
- Elle est difficile chez l'enfant obèse
- Elle peut être faussement négative au stade de pré-glissement
- IRM:
- Examen sensible aux stades de pré-glissement
- Élargissement de plaque de croissance
- Oedeme du col et épanchement intra articulaire
- Indiquée chez l'enfant à risque présentant des douleurs persistantes avec radiographie négative ou bien douteuse
- Détecte une atteinte controlatérale
- Parfois demandée en préopératoire avant une réduction
- Recherche des d'ischémie de la tete fémorale
- Le scanner:
- Dans les cas litigieux
- En préopératoire pour apprécier l'angle de Southwick
- La réaction périostée postérieure
- La déformation antérieure du col
- Les lésions acétabulaires
- Le pont de l'épiphysiodèse
- La scintigraphie:
Pour le diagnostic des complications: l'ostéonécrose de la tete fémorale et la chondrolyse si l'IRM n'est pas réalisable pour des raisons techniques
IV- Le traitement:
- Il s'agit d'une urgence thérapeutique
-Il faut mettre l'enfant en décharge pour éviter les complications
- Le but est de stopper le glissement, accélérer le fusion de la physe, et éviter les séquelles arthrogènes
- L'indication dépend du stade de glissement et du caractère stable ou pas :
Stade I glissement < 30°: vissage percutané insitu
Stade II glissement entre 30- 50°: vissage percutané avec risque important de complications
Stade III glissement > 50°: réduction chirurgicale à ciel ouvert par arthrotomie de DUNN
- Traitement préventif de la hanche controlatérale qui dépend des facteurs de risque de bilatéralisation
I - Technique du traitement par vissage percutané insitu:
- Au bloc opératoire
- Contrôle scopique
- Sous anesthésie générale, intubation endotrachéale
- sur table orthopédique sans aucune tentative de réduction
- Incision percutanée antérieure de 5 mm
- Utilisation d'une vis canulée de Depuy
- Repérage du trajet par une broche percutanée
- Vérification scopique du bon centrage au niveau du col de profil et de face
- Mise en place de la vis et fixation de la calotte épiphysaire en évitant l'effraction du cartilage articulaire
- Dernier contrôle scopique de face et de profil
II - L’ostéotomie de DUNN classique:
-Installation:
- Au bloc opératoire
- Sur table orthopédique
- Sous anesthésie générale ou rachi anesthésie
- En décubitus dorsal avec un billot sous la fesse homo latérale pour un abord antéro- externe ou bien en décubitus latéral strict pour l'abord latéral
- Les voies d'abords:
1- La voie d'abord de Watson Jones:
C'est une incision dont la première partie est oblique de l'épine iliaque antero-supérieure vers le grand trochanter, et la deuxième est verticale le long de la diaphyse fémorale
2- La voie de Hueter
3- La voie par tranchantérotomie
- Le muscle fessier est écarté en arrière, les muscles tenseur du fascia lata et le droit antérieur sont écartés vert l'avant
- Désinsertion du vaste antérieur en L inversé
- Exposition du grand trochanter
- Repérage et respect de l'artère collatérale trochantérienne
- Capsulotomie en T dans l'axe du col
- Mettre les berges de la capsule sur des fils
- Exposition du périoste et de la synoviale inflammatoire
- Incision du périoste du col et son décollement à la spatule
- Soulèvement du col fémoral à l'aide du crochet de Lambotte pour éviter de léser la vascularisation
- Fixation primaire par une broche guide avant l'ostéotomie
- Résection osseuse raccourcissant le col de 1,5 à 2 cm en commençant par des ciseaux à 10 mm puis à l'aide d'une pince gouge, et l'utilisation d'une pince de Kerisson facilite la résection du cal postérieur
- Après la résection osseuse, une réduction sans tension et sans traction en rotation interne entraînant la couverture complète de la zone réséquée par le bord de l'épiphyse
- Contrôle radiologique
- Synthèse définitive par une ou deux vis canulées
- Capsulorraphie par des points séparés
- Synthèse du grand trochanter par vis avec prise de la corticale médiale
- Les suites de l’intervention:traction du membre inférieur pendant trois semaines avec mobilisation passive précoce
L'appui est autorisé après six semaines post opératoires et contrôle radiologique
III- Ostéotomie de DUNN antérieure :
Il s'agit d'une ostéotomie par voie antérieure ayant pour avantage une réduction anatomique sans trochantérotomie
Indiquée généralement pour les EFS stades III ou angle de bascule > 60°
Cependant l'absence de contrôle per op du pédicule vasculaire reste son inconvénient majeur
2- Incision de Smith Peterson:
- C'est une incision étendue dont la première partie débute sur la crête iliaque jusqu'à l'épine iliaque antéro-supérieure et la deuxième partie se prolonge vers le bas en direction du bord externe de la rotule
- Passage entre le fascia lata et le couturier
- Ouverture du cartilage de la crête iliaque, fosse iliaque externe est ruginée jusqu'au cotyle
- Désinsertion du tenseur du fascia lata et du droit antérieur
- Exposition de la face antérieure de la capsule articulaire qui est ouverte en T dont la branche verticale est dans l'axe du col
- Mise en place de fils tracteurs sur les berges de la capsule
- Incision du périoste dans le même sens que la capsule
- Libération sous périostée du col avec une rugine de Cobb ou une spatule large
- Séparation de la face postérieure de la métaphyse de l'épiphyse
- Libération prudente du col de son périoste à la face postérieure
- Mise en place de deux écarteurs contre coudés sous le périoste du col fémoral
- Ostéotomie trapézoïdale à base antérieur avec un raccourcissement de 1,5 à 2 cm
- Réduction du col sur l'épiphyse sans tension en rotation interne
- Fixation provisoire par broche filetée
- Control scopique
- Ostéosynthèse par deux vis canulées
- Capsulorraphie et fermeture plan par plan sur un drain de redon en aspiration
- Antibiotiques, antalgiques, anti inflammatoires
- Traction du membre inférieur pendant trois semaines
- Mobilisation passive précoce pour éviter les rétractions
- Appuis avec béquilles au 15 eme jour post op et total après trois mois et contrôle radiologique
NB: les différentes ostéotomies:
- La surveillance post opératoire:
- Verticalisation le lendemain pour les epiphysiolyses chroniques stables et quelques semaines après pour les EFS aiguës et chroniques instables
- Parfois traction post opératoire
- Surveillance de la réapparition de la douleur et la survenue d'un enraidissement
- contrôle régulier à la consultation externe pour détecter les complications ischémiques, les séquelles, la bilatéralisation avec des radiographies de contrôle
- Scintigraphie osseuse au moindre doute de nécrose
- Complications post opératoires:
- La nécrose avasculaire dans 4 à 25% des cas
- La chondrolyse dans 30 à 47% des cas
- L'inégalité des membres inférieurs
- Le conflit fémoro acétabulaire
- L'amyotrophie
- La raideur
- La fracture du matériel
- La pseudarthrose dans les ostéotomies
- L'infection
- La bilatéralisation
- Résultats fonctionnels évalués par le score de Harris
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